En ce retour de 14 juillet, je mets la dernière touche aux corrections de mon prochain livre, Vannes et le Golfe du Morbihan d’antan. Comme vous devrez attendre l’automne pour pouvoir le feuilleter, je vous propose d’en découvrir quelques (bonnes) pages. Celle-ci évoque l’arrivée du train à Vannes en 1862. J’adooore le lyrisme de l’évêque venu bénir les locomotives. Trop marrant ! Amusant aussi de constater l’incidence que cela eut (déjà !) sur les prix de l’immobilier.

« Ma doué, quel événement que l’arrivée du train, le 21 septembre 1862, simultanément à Vannes et Lorient. « Un soleil splendide a lui et ce n’était pas, en ces temps de saisons détraquées, la moindre curiosité de le fête » relata le Courrier de Bretagne. Tous les notables étaient présents, forcément. Même les conservateurs, hostiles au modernisme, écoutèrent avec attention le discours lyrique de l’évêque Mgr Louis-Anne Dubreil, venu bénir les locomotives: « Elle va ouvrir son sein, cette vieille Armorique que nos aïeux appelaient sanctuaire ; elle va l’ouvrir pour recevoir des étrangers qui viendront vers elle de toutes les parties du monde et qu’elle attend avec une noble fierté… Elle va devenir féconde, cette terre que les Clisson, les Duguesclin firent si glorieuse. Elle va grandir encore sous l’influence de cette artère vivifiante qui la sillonnera dans tous les sens au contact de ces chars rapides comme l’éclair, supprimant l’espace, élargissant l’existence, portant à chaque peuple les idées, les découvertes et les productions de tous les peuples ».

En fait, la « vieille Armorique » a bien failli louper le train … de la modernité. La Bretagne était un territoire enclavé. Le Morbihan, bien qu’étant un des départements les plus peuplés, souffrait d’une faible urbanisation. Oublié des stratégies gouvernementales, il ne disposait que d’un réseau de 300 kilomètres de routes départementales. En 1840, la plupart des chemins n’étaient praticables que pour les piétons et les cavaliers. Les marchandises chargées à Vannes mettaient sept jours pour parvenir à Paris. À cette époque, la priorité du gouvernement était l’accessibilité des arsenaux et des ports. Celui de Vannes étant mineur, le premier projet de ligne ignorait carrément le chef-lieu, passant par la vallée de l’Arz afin de faciliter les débouchés des Forges de Lanvaux et Trédion.

Les élus vannetais, d’abord réticents au passage de cette machine infernale, changèrent d’avis et entreprirent une action après de la Compagnie d’Orléans pour qu’elle modifie son tracé. La crise financière de 1857 retarda le lancement des travaux mais le chantier fut lancé, employant des paysans, des ouvriers, attirés par des salaires prometteurs et … six-cents prisonniers autrichiens ! C’est le préfet qui a eu l’idée de demander au ministre l’autorisation d’employer cette main d’œuvre inattendue casernée à Vannes (à l’époque, la France était engagée aux côtés du roi de Piémont-Sardaigne contre l’Autriche)

(…) Deux ans après l’arrivée du train, le Conseil général observait que « dans l’intérieur comme sur le littoral, les terres ont triplé de valeur. De nombreux étrangers viennent maintenant se les disputer… »


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