Aujourd’hui, c’est Françoise qui nous écrit de la baie du Mont-Saint-Michel. Depuis ce lieu béni pour une retraite, elle se présente et nous envoie un poème.
Née à Rennes, elle a passé sa tendre enfance et son adolescence sur les bords du Gast, entre Rennes et Combourg. Mais « gast » … elle a aussi des racines finistériennes et encore des cousins « issus de cousins » sur cette pointe de terre. Bien ancrée à l’Ouest donc, avec une grand-mère bretonnante née à Ploudiry près de Sizun et un grand-oncle qui fut l’un des meilleurs « rebouteux » de Rennes !
Autodidacte, cette curieuse de nature a trouvé sa seconde terre de l’autre côté du Couesnon, dans la Baie du Mont-Saint-Michel. Arrivée à Avranches il y a plus de 30 ans, elle apprécie cette « fenêtre » ouverte sur la baie, ses belvédères donnant sur des paysages d’exception. Investie dans le secteur du tourisme, elle affectionne tout particulièrement le triangle sacré « Avranches – Genêts – le Mont ».
Guide de la baie de 1989 à 1996, elle garde le plaisir de ces traversées des grèves au quotidien, seule ou en groupe, pour des vagabondages chaque jour différents, sur ces « chemins de paradis » dans cesse re-sculptés. Cette expérience unique lui a permis de connaître tout de ĺa baie : les derniers pêcheurs à pied d’hier, les écosystèmes et les travaux des scientifiques sur ce laboratoire vivant. Une véritable passion !
Dans ce cadre, elle a dirigé l’association pour la Mise en Valeur du Patrimoine de la baie pendant huit ans, avec la gestion de la première Maison de la baie à Genêts – l’un des plus beaux villages du coin – et mis en place une politique d’animation avec de nouveaux modes d’itinérance : traversées de la baie, randos et sorties thématiques, initiation à l’environnement pour les scolaires.
Elle a travaillé pendant dix ans pour les services du tourisme de la Manche, comme chargée de promotion du secteur, ce qui lui a permis d’œuvrer à des événements et spectacles comme le Rallye nature, la Rando Baie, « Une nuit au Moyen-Age »…
Elle cite Bertrand Poirot-Delpech qui éprouvait ausi un attachement viscéral à la baie :
» Ici, la terre et l’eau célèbrent une noce inconnue sur le reste de la planète ».
Elle travaille actuellement dans un Centre d’information touristique.
Cette amoureuse des mots, privée de sa Merveille depuis le mardi 17 mars 2020, nous fait passer en ces temps de confinement, sa vision poétique et pas seulement de « notre changement d’heure, … sans transition »…
« Changement d’heure, sans transition ».
Dis !
Tu te souviens …
Nous cherchions la façon
de rentrer en « transition »,
De sensibiliser
sans être taxé
de « vert » …Nous voulions redonner
du sens,
du bon sens…
Aujourd’hui
Nous rentrons en transes
État second
Somme toute
Le doute
La température monteDans tous les sens
Pour couronner le tout
État fébrileLà, sans transition
– si pardon,
celle du confinement
qui nous laisse barboter
dans nos confortables intérieurs –
nous entrons
dans un demain
aux contours
bien flous
encore…La grande bascule …
et nous sommes loin
de la chanson de Marc Lavoine
« Bascule avec moi »…La grande bascule …
sans transitionPas vu venir
la farce du pangolin
sauce piquante
La valse des avions
cette dynamite
la croisée de toutes les nations
du globe
celle qui laisse des traces
dans le ciel bleuQuand le viral
atteint
notre espace vital…Même les verts
n’en croient pas leurs yeux
et leurs oreilles
dans nos jardins d’Eden
fermés
jusqu’à nouvel ordreIls l’avaient tant rêvé,
tant tambouriné
à la porte des ministères…
tout de vert vêtu
presque toujours animés
des meilleures vertuspourtant …
Il n’y avait pas que
Les verts pour la planète
Il y avait …
Les pompiers caillassés
Les policiers poil hissé haut
Les gilets jaunes exaspérés
Les salariés déboutés
Monsieur et madame Toulmonde
Tout le monde
Les blouses blanches salies
le stéthoscope en bandoulière
Rouges de colère
Car sur l’hôpital
le lierre
a poussé
La croix et la bannièreLe vert … ça eut payé…
c’est pourtant la couleur de l’espoir
Mais la finance
qui danse sur les lianes
De la haute voltige
nous afflige
Nous voyons rougeNous sommes verts
décomposés
vert-de-gris
grillés
à l’annonce du printemps
notre nouvel an chinois
sur le gong
est confiné
dans notre dedans
Le coeur
serré
comme les petits pieds
bandés
de Pearl Buck
dans « Vent d’est, vent d’ouest «Tradition
quand tu nous tiensPas masqués
Les masques ne servent
A rien
BeurkCe soir
nous changeons d’heure
de fuseau horaire
ll y a un bug
sur l’échelle du tempsDes espoirs ?
Nous changeons d’ère
d’heure en heure
Nous sombrons dans un jour nouveau
Respire !Désespoir ?
Il est venu le temps
de remettre les pendules à l’heureMais …
les mécanismes sont vrillés, grippés …Tout a pris un peu
de plomb dans l’aile …
Même le coq du village
en ces temps de disette
électorale…
Pas une simple grippette
Camouflet
Plus de strass
On parle à voix basse
La messe est diteReport à une date
ultérieure
Contaminés
S’abstenir
SRASAttention
la démocratie ne crie plus
quand
elle a peur
Je vous le confesseElle a mal
Elle se tapit
Elle s’essouffle
Particules fines
État
Mâle dominant
Asthme
Spasme
AsphyxieElle s’écrase, elle se terre …
On ne sait plus
à quel saint
se vouer !Tout le monde s’abstient
de trop penser
à demainDu vent
Prière de ne pas penser
Laissez-moi respirerVertigineux
depuis le sommet de la flèche
siège
de l’ange suprêmeAssiégé
notre président
a lui aussi du mal
à flécher
à tenir son siège
Il s’époumone
Parole contre parole
Yaka
Faukon
sont ses meilleurs
conseillers
particuliers
Marchez
dans vos intérieurs
ou marnezFaucon pèlerin
Vautours au sommet
Marchons
Pour prendre
Las
Un peu l’air
Dans ce bal
MasquéLa science infuse
avec sa porte-parole
qui empêcherait un croque-mort
de broyer du noir
Elle nous enfumeÉcueils
Cercueils
Rats des villes et des champs
Tous confinés
L’ exode de printemps
La cabane au Canada
Le grand dé-ménagement
Sauve qui peutLes labos sont en émoi
Et moi et moi
Désarroi
Les docteurs
à la solde du pouvoir
en effervescence
Cachés
On nous somme
De l’être ou de le resterStatistiques
Pas assez de lits
État de siège
Attaque virale
Bientôt le Saint-Siège
Donnera sa bénédiction
La mort
par procuration
On nous entubeOn nous dit d’avancer
masqués
mais
même Venise
a fermé ses canaux,
ses gondoles
et les masques
chagrin
sont dé-portés
aux calendes grecques …Confisqués
Les masques
sont sur tous les visages
GravesImpossible de flécher
sur le cadran.
L’heure
n’est pas à la fêteLente agonie
On intube
La pendule
S’affole
Ne pas passer
De l’autre côtéPassez
Larmes
A gaucheNon
C’est à droite
Avancez
l’aiguille
D’un cranArmer !
Dur de repasser en manuel
car tout est automatiqueÉlectrique
ImpulsionLes artisans
de l’art campanaire
aussi en mode confinés
pas prêts à escalader
les madriers instables
de nos poutres rongées
par la vermine …Malades
Incrédules
pour nous remettre
les pendules à l’heure
légale
L’heure d’été
Bien confinée
ou
à celle du soleil
C’est égal
qui par nature
dicte
la cadence
de nos joursDu tact
Tic tac
Avaler la pilule
Passer le capC’est l’étale de pleine mer
24 heures suspendues
Un tsunami
entre les fuseaux
de l’info à gogo
L’ écume des jours
Létale
Sur tous les toits
C’est Clochemerle
Et toi ?Suspendue
Suis-je née sous une bonne étoile ?Covid19, tu nous sonnes les cloches …
… mais pour qui sonne le glas ?
A vos cadrans
Vos ombres projetées
font écran24 heures de la vie
d’une femme
d’un homme
valent
toutes
la peine
qu’on s’y arrête
au chevet du temps
pour insuffler la vieMême
Si
Souffler n’est pas jouer
On ne peut remettre
La partie d’avant
EnvoléeDéfalquer une heure
Avancer ou reculer ?Ça se joue
De si peu
De-ci de-là
De l’Asie
A ici ou en Italie
Aujourd’hui
Ébranlés
Nous sommes déjà demainL’heure du réveil
a sonné
Décalage horaire
L’horreur
Une heure
Je ne suis pas du matinBascule avec moi
Sur le lit
De la vie
Nature
Restons
Connectés
Au temps
Ici
MaintenantDemain sera un autre jour …
A la bonne heure !
Françoise Loret
PS : non, il n’y a pas d’erreur dans les photos publiées ! Françoise y a glissé une photo du carnaval de Granville.
1 commentaire
SErvane · 11 avril 2020 à 9 h 25 min
C’est très beau, il faudrait le slamer…. j’aime cette colère froide….