À l’heure où certain candidat à la présidentielle nomme son parti Reconquête en référence à une « reconquista » ibérique lancée contre les musulmans – je vous conseille la lecture de l’excellent article sur l’historien Florian Mazel dans Ouest-France https://www.ouest-france.fr/culture/histoire/florian-mazel-l-historien-rennais-qui-nous-fait-aimer-le-moyen-age-12744fe6-6ef5-11ec-a06f-68f1fb79f28c Si vous n’êtes pas abonné, je vous donne juste cet extrait « Parler de reconquête à propos d’une civilisation qui s’est développée pendant plusieurs siècles, c’est assez incroyable. C’est comme si on disait aujourd’hui que la France allait reconquérir l’Europe parce que Napoléon l’avait conquise à un moment »
À cette heure, donc, je vous encourage à voir l’exposition Arts de l’islam, un passé pour un présent, au musée des beaux-arts à Rennes et dans 17 autres villes (en musée, médiathèque, bibliothèque ou espace culturel) car ce projet a été conçu dans un cadre collaboratif, à l’initiative de la Fondation de l’Islam de France. Son commissariat général a été assuré par Yannick Lintz, directrice du département des Arts de l’Islam du musée du Louvre (oui, c’est bien une femme) et relayé à Rennes par François Coulon qui n’a eu qu’à sortir de magnifiques pièces de la collection Robien.
Depuis sa création en 2012 (signée Rudy Ricciotti https://www.lemoniteur.fr/article/le-louvre-leve-le-voile-sur-le-departement-des-arts-de-l-islam.1491339 ) le département des Arts de l’Islam du Louvre offre une immersion au sein des cultures islamiques, de l’Espagne à l’Inde, du VIIe au XIXe siècle, et révèle l’importance des échanges anciens, étroits et féconds tissés entre la France et l’Orient. Témoins artistiques et historiques, les œuvres d’art illustrent la diversité culturelle et confessionnelle du monde islamique depuis treize siècles. Elles sont le reflet de la circulation des idées et des hommes mais aussi de l’héritage pluriel du patrimoine français. Face aux fanatismes religieux et aux a priori, la culture se doit d’être sans relâche un rempart et un levier pour transmettre, ouvrir à l’autre, redonner des clés de compréhension de passés croisés pour construire un avenir partagé. C’est dans cette perspective qu’a été lancé ce projet afin de poser un nouveau regard sur les arts et les cultures de l’Islam.
Pour chaque accrochage, dix œuvres, à la fois historiques et contemporaines incarnent la richesse des cultures de l’Islam et leur inscription dans l’histoire de France. Parmi les œuvres, on découvre ces merveilles : une lampe de mosquée du XIe siècle provenant de Jérusalem, un chandelier de l’époque de Saladin signé par un artiste de Mossoul racontant la vie de Jésus, des boîtes de toilettes en ivoire du XIIIe siècle ayant appartenu aux duchesses de Bourgogne, provenant de l’abbaye de Cîteaux (aujourd’hui au musée des Beaux-Arts de Dijon), une œuvre de l’artiste Hiwa K, One Room Apartment (FRAC Normandie) ou bien Les Collages de Topak Ev de l’artiste française d’origine turque Nil Yalter.
La civilisation islamique est autant arabe que turque, indienne qu’iranienne, asiatique ou maghrébine… Les œuvres présentées font valoir cette large variété de pratiques et sensibilités artistiques, évoquant le quotidien, la nature, le désir amoureux, un simple décor de palais ou de mosquée.
Si l’exposition « Arts de l’Islam, Un passé pour un présent » incite à la curiosité, elle est d’abord une invitation à s’émouvoir. Rien ne vous empêche d’ailleurs d’organiser un tour de France en 18 étapes pour découvrir toutes ces merveilles !
Je conclurai avec ces mots de Jean Castex (si si !), en exergue du catalogue :
« Élève tes mots, pas ta voix. C’est la pluie qui fait grandir les fleurs, pas le tonnerre », écrit le poète Djalâl ad-Dîn Rûmi. Cette exposition qui « élève les mots » et les choses est une réponse directe à tous les discours de haine et les tentations anxiogènes, dans la mesure où elle rappelle que le dialogue des cultures n’a jamais cessé dans notre histoire et doit nous inspirer pour le temps présent, tant il est indispensable à la compréhension mutuelle ».
20 NOVEMBRE 2021 – 27 MARS 2022
1 commentaire
Sachot France · 17 janvier 2022 à 19 h 53 min
Merci pour la diffusion de l info et les commentaires.
La Reconquista est aussi appelée par des historiens la Conquista au regard de la réalité de l Espagne en l an 8 quand arrivent les premiers guerriers depuis la Syrie..il n existait pas de royaume chrétien mais des seigneurs se livrant bataille.
Cette cohabitation culturelle pendant 7 siècles entre juifs chrétiens et musulmans….a été fructueuse par période et un exemple de tolérance.Entre la remontada et la Reconquista le monde ibérique est inspirant pour les politiques français !