À travers deux expositions, le Musée des beaux-arts de Rennes propose une vision inédite de l’art de la première moitié du 20e siècle à Rennes et à Paris. Depuis l’avènement de la IIIe République en 1870, la France menait une large réflexion sur la nécessité de remodeler la pédagogie artistique dispensée dans les écoles et de l’adapter aux mutations de la vie moderne. Si l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris demeurait une référence incontournable, la province lança des établissements sur le même modèle, mais davantage orientés vers les arts appliqués et industriels.
Au début du 20e siècle, en Europe, on assistait à l’essor d’une nouvelle esthétique portée par les « avant-gardes » (fauvisme, cubisme, abstraction…). Un peu à l’écart de ces mouvements, Rennes mettait à l’honneur des valeurs plus académiques – que les générations suivantes ont un peu oubliées. Saluons donc cette initiative du musée qui montre la mémoire d’une époque de transition et de questionnement qui marque le basculement final entre l’esprit du 19e siècle et celui du 20e siècle.
Rennes, capitale de la Bretagne ? s’interroge Guillaume Kazerouni, conservateur au musée de Rennes. Dans le (superbe) catalogue, il répond en énumérant les événements qui permettent de répondre par l’affirmative. Parmi eux : l’inauguration à l’hôtel de ville de la pièce dédiée aux morts de la Grande Guerre, conçue par l’architecte municipal Emmanuel Le Ray et ornée d’une longue frise peinte par Camille Godet. Cette salle venait clore un programme décoratif commencé dix ans plus tôt par le maire Jean Janvier (républicain, radical de gauche)
Mais revenons au sujet de l’enseignement artistique à Rennes : il avait commencé en 1757 avec la création d’une école gratuite de dessin. Celle-ci évolua durant tout le 19e siècle jusqu’à ce qu’en août 1881, le maire Edgar Le Bastard signe une convention avec l’État pour la transformer en École régionale des Beaux- Arts. Bénéficiant ainsi de subventions et soumise à des inspections, l’école déménage des salles du musée pour s’installer d’abord dans la Halle aux toiles et ensuite dans les combles du palais du Commerce (actuelle poste de République) en 1891. Peu appropriés aux cours, les locaux investirent en 1911 le couvent de la Visitation (rue Hoche) que Jean Janvier avait acheté pour les affecter à l’école et au conservatoire de musique. La direction, commune avec celle du musée des Beaux-Arts, est d’abord assurée par des artistes : le statuaire Charles Lenoir (de 1881 à 1899) puis le peintre Félix Lafond (de 1899 à 1915), tous deux parisiens, et ensuite Jules Ronsin (1915-1935) et Pierre Galle (1935-1948), anciens élèves de Rennes.
D’autres élèves se firent remarquer et décrochèrent des prix dans les salons et aux expositions universelles et internationales de Paris en 1889, 1900, 1925 et 1937. Les cours de l’école s’étaient ouvert aux jeunes filles en 1899. Henriette Galli fit partie des premières étudiantes et Jeanne Malivel compta parmi les premières enseignantes à intégrer l’école pour la création du cours de gravure sur bois. Perso, j’ai été très émue de voir en photo cette artiste déterminante dans la création du mouvement des Seiz Breur. https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_Malivel
Cela vous donnera surement envie de partir à la découverte des œuvres de ces artistes dispersées dans la ville, notamment les décors de l’Opéra et de la Maison du Peuple (salle de la Cité).
L’expo dure jusqu’au 7 mai. Si vous pouvez, allez à une visite commentée par Guillaume Kazerouni (vous allez a-do-rer !) et offrez-vous le catalogue, co-édité avec les éditions SNOECK : il est superbe.
Une autre expo épatante est consacrée au peintre et illustrateur parisien André Devambez (1867 – 1944), un grand gaillard facétieux et talentueux que j’aurais adoré connaitre. Je vous en parlerai la semaine prochaine.
1 commentaire
Bourges · 27 février 2022 à 7 h 55 min
Merci beaucoup pour ce billet MCB !!! Grâce à ces premières informations, on va pouvoir profiter en pleinement ….On va sûrement y aller